Les garnis et l'arrivée de Georges Navel à Lyon
Né en 1904, Georges Navel est le benjamin d’une famille nombreuse d’ouvriers-paysans. En mai 1915, éprouvée par les bombardements, la ville de Maidières est évacuée par la Croix-Rouge afin d'envoyer les enfants en Algérie. En 1916, il rejoint sa famille évacuée à Lyon, qui vit dans un garni rue de la Part-Dieu, à proximité d’un « quartier malfamé » qu'il décrit dans son oeuvre Travaux. Il raconte dans celle-ci que le quartier était surtout fréquenté par des prostituées et le personnel colonial des usines de guerre. Par ailleurs, dans son article "Zola chez les ouvriers", il décrit de la façon suivante sa vie à cette époque: "Gens de Pont-à-Mousson, réfugiés de la guerre 14-18, nous habitions à Lyon, en garni, une maison peuplée de familles ouvrières dans un quartier populeux, comme on dit des quartiers de pauvres gens". Aux côtés de ses frères, il participe à de nombreux meetings d'avant-garde et réfléchit aux problèmes de la société future qu'il souhaite communiste-libertaire. Au bout d’un an, Georges quitte l’école et décide de travailler dans un atelier de guerre à l’étamage des bidons avant de s’essayer ensuite brièvement au travail sur chantier dans l’enclos de la centrale électrique de Jonage. Grâce à Groethuysen et Paul Géraldy, Navel se rapproche ainsi des cercles littéraires de la NRF. En 1945, il publie Travaux, grand succès de librairie, lauréat du Prix Sainte-Beuve. D’autres ouvrages suivent, faits de la même pâte autobiographique comme Parcours (1950), Sable et Limon (1952), Chacun son royaume (1960) et Passages (1982).
L'historienne Anne Granier a pu étudier un garni au 6 rue Smith près de Perrache et de l'Arsenal qui enregistre le passage pour des séjours plus ou moins longs (de un mois et demi en moyenne) de 292 personnes pendant la guerre. Trois groupes principaux y sont présents : des mobilisés de passage (parfois en couple), quelques réfugiés et un fort contingent de travailleurs algériens de l'Arsenal tout proche. Les garnis témoignent non seulement d'un mode de vie souvent précaire mais aussi des flux intenses de population qui animent Lyon pendant la Grande Guerre.
Bibliographie
- Navel Georges, Travaux (Gallimard, 2008).
- Navel Georges, Parcours (Gallimard, 1950).
- Sous la direction de Gérard Meudal, Georges Navel ou la seconde vue, Cahier un (Le temps qu'il fait, 1982).